Iconographie sur Saint-Barthélemy

Si les Suédois ont dénommé et dessiné la ville de Gustavia, ce sont bien les esclaves Africains qui en première ligne l'ont bâti : pierre après pierre, rue après rue, quai après quai, poutre après poutre, maison après maison... les "ordonnances" n'en font aucun mystère. Et celui dans la nécrologie duquel Gustavia est une fille, pour en avoir posé la première pierre, Adolf Fredrik Hansen, n'est-il pas le plus grand négrier que cette île ait connu ? jusqu'à baptiser de son nom l'une de ses collines...

L'objet premier de la présente étude a été de retranscrire, et le cas échéant de traduire, les textes portés sur les nombreuses cartes ayant préfiguré la construction de Gustavia. Il s'agissait aussi de parfaire un classement chronologique des cartes, plans, dessins, peintures et photos existants. Cette recherche, qui au final aura dépassé largement du "cadre fixé", révèle une coupure importante entre les années 1807 et 1848 où il n'a pas été mis à jour d'archives iconographiques ayant trait à l'île de Saint-Barthélemy dans son histoire coloniale.

Il en aurait sans doute été sensiblement autrement si le plus prolifique des dessinateurs du lieu et de l'époque, Samuel Fahlberg (1758-1834), n'avait été contraint et forcé de quitter l'île de Saint-Barthélemy conséquemment à la seule insurrection que connut Gustavia la Suédoise, en septembre 1810.

Une insurrection qui n'aurait étrangement jamais été tout à fait élucidée et sur laquelle nous reviendrons bientôt... Un monument "très célèbre", classé au titre des Monuments Historiques en 1977, lui est indirectement dédié : « le monument funéraire d'August Nyman ». Un clin d'œil du destin a voulu que cette pièce se retrouva conservée au Musée Schœlcher de Pointe-à-Pitre pendant bon nombre d'années. Tout d'abord posée sur la tombe du dénommé Nyman dans le cimetière suédois du quartier de Public à

Saint-Barthélemy, elle fut ensuite placée sur une colonne dans l'enceinte du fort Gustave III qui domine Gustavia (on la distingue sur cette photo). On ne sait en fait par quelle troublante coïncidence exactement ce monument se retrouva alors en Guadeloupe, mais une chose est sûre : il ne faisait pas partie de la collection personnelle dont M. Victor Schœlcher fit don à la Guadeloupe en 1883 et pour laquelle un bâtiment fut donc tout spécialement construit et achevé en 1887 ; Selon l'ancien conservateur du Musée Schœlcher, M. Henry Petitjean Roget, l'urne serait revenue au seul Musée qui devait exister à l'époque car elle était en danger à Saint-Barthélemy : elle y servait de cible à des chasseurs et porte d'ailleurs toujours les impacts de plombs de chasse écrasés ! Ce transfert, qui serait antérieur à 1935 [cf. Magras, Arlette. Parfums d'Antan. La vie à Saint-Barthélemy de 1648 à nos jours, Millau, Imprimerie Maury. 2003.], se terminera finalement par la restitution du dit-monument historique à Saint-Barthélemy, à l'initiative de M. Petitjean Roget et à l'occasion de l'ouverture du Musée de Saint-Barthélemy en 1995 à Gustavia... à croire que les éléments constitutifs de l'histoire de cette île auraient un goût immodéré pour le voyage (cf. Fonds Suédois) !

« le monument funéraire d'August Nyman » : il s'agit plus précisément d'une urne funéraire en marbre sur laquelle est inscrit, en suédois, le texte suivant traduit en français par M. Frank Olrog : « August Nyman fut conduit ici en 1814 par de nombreux amis différents quant à leur langue et leur couleur mais unis dans leurs larmes. Il est beau de mourir ainsi. »

M. Olrog décrit de même l'autre côté de l'urne dans son étude de 1976, « Le monument d'August Nyman au musée Schoelcher » dans Bulletin de la société d'histoire de la Guadeloupe, Basse-Terre (Guadeloupe), no 28, p. 51-56 : « L'autre côté est orné d'une figure allégorique représentant « la déesse des Indes occidentales ». Elle porte un caducée et un esclave s'agenouille devant elle et lui présente des cannes à sucre. (...) » Une allégorie de l'esclavage qui, pour un temps, avait bien toute sa place au Musée Schœlcher...